Conte n°2 – L’Empereur et le Roi

L’EMPEREUR ET LE ROI

Il était une fois un empereur qui n’avait pas d’enfant, et un roi qui, lui non plus, n’avait pas d’enfant. L’empereur décida de parcourir le monde, s’étant dit qu’il trouverait peut-être quelque conseil ou quelque remède à son problème. Quant au roi, il décida, lui aussi, de parcourir le monde.
Le roi et l’empereur se rencontrèrent dans une auberge, mais ils ne se connaissaient pas. Cependant, l’empereur reconnut le roi d’après ses manières royales. Il l’interrogea et le roi lui avoua effectivement son identité. Lui aussi avait remarqué les manières royales de son interlocuteur et l’empereur confirma son impression. Ils se racontèrent le but de leur voyage. Ils convinrent que si à leur retour leurs épouses avaient, qui une fille, qui un garçon, ils marieraient les enfants l’un à l’autre.

L’empereur rentra chez lui et eut une fille ; le roi rentra chez lui et eut un garçon. Mais l’arrangement fut oublié. L’empereur envoya sa fille étudier, et le roi envoya son fils étudier. Les deux enfants arrivèrent chez un précepteur et tombèrent amoureux l’un de l’autre. D’un commun accord, ils décidèrent de se marier. Le prince prit une bague, la passa au doigt de la princesse et ils s’unirent. Plus tard, l’empereur envoya chercher sa fille et la fit ramener chez lui. Le roi envoya chercher son fils qu’il fit ramener chez lui.

On fit un arrangement de mariage pour la fille de l’impératrice, mais celle-ci n’en voulut point, à cause de son lien avec le prince. Quant à lui, il éprouvait beaucoup de nostalgie pour elle. La princesse était toujours triste. L’empereur lui fit visiter sa cour, ses palais, lui montra sa magnificence mais la princesse demeurait toujours aussi triste. Quant au prince, il éprouvait une si profonde nostalgie pour elle qu’il finit par en tomber malade.

Lorsqu’on lui demandait : ” Pourquoi es-tu malade ? ” il ne voulait pas répondre. On dit à son serviteur : ” Peut-être réussiras-tu à le faire parler ” ? Le serviteur répondit : ” Je sais “. Il avait accompagné le prince chez le précepteur et savait de quoi il souffrait. Il leur dévoila l’histoire. Le roi se souvint alors de l’arrangement qu’il avait conclu bien longtemps auparavant avec l’empereur. Il demanda par écrit à l’empereur d’organiser les préparatifs du mariage, car le pacte avait été conclu depuis longtemps. Mais l’empereur ne voulait plus de cet arrangement. Cependant, comme il ne souhaitait pas froisser le roi, il lui envoya une lettre dans laquelle il lui demandait de lui envoyer son fils, afin de voir s’il était capable de diriger les affaires d’un pays.

Le roi envoya son fils chez l’empereur qui l’installa dans une chambre. Il lui fournit des documents relatifs aux affaires de l’état afin de tester ses capacités à diriger le pays. Le prince se languissait de voir la princesse, mais il lui était impossible de la rencontrer. Un jour, tandis qu’il se promenait le long d’un mur de miroirs, il aperçut la princesse et s’évanouit. Elle se rendit auprès de lui, lui redonna courage et lui déclara qu’elle ne voulait pas d’autre parti que lui à cause du lien qui les unissait. Il lui dit alors : ” Que faire ? Ton père n’est pas d’accord “. Elle lui répondit que, quoiqu’il en fût, elle resterait quand même avec lui. Et ils décidèrent de partir sur les mers. Ils achetèrent un navire et partirent loin sur les mers.

Ils voguèrent, puis voulurent accoster. Ils arrivèrent en vue d’un rivage où se dressait une forêt. Ils débarquèrent et pénétrèrent dans la forêt. La princesse enleva sa bague qu’elle donna au prince et s’étendit pour dormir. Lorsque le prince vit qu’elle allait se réveiller, il posa le bijou près d’elle. Puis ils revinrent au navire. Alors, la princesse se souvint qu’ils avaient oublié la bague dans la forêt et envoya le prince la récupérer. Il partit mais ne put retrouver l’endroit. Il avança plus loin mais ne trouva pas la bague. Il chercha d’un endroit à l’autre et finit par se perdre, sans pouvoir retourner au rivage. La princesse partit à sa recherche et se perdit. Quant au prince, il avait continué à errer et avait aperçu un chemin. Il l’emprunta et arriva dans un village. N’ayant rien à faire, il devint serviteur.

La princesse erra puis décida de s’installer au bord de la mer. Elle revint au rivage. Des arbres fruitiers y poussaient. Elle s’installa. Dans la journée, elle parcourait le rivage, espérant trouver quelqu’un. Elle vivait de fruits ; la nuit, elle grimpait dans un arbre pour se protéger des bêtes sauvages.

Il était une fois un marchand très important qui faisait du commerce dans le monde entier. Il avait un fils unique. Le marchand était déjà vieux. Un jour, son fils lui dit :
- Etant donné que tu es vieux et que je suis encore jeune, que tes gens de confiance ne font pas attention à moi, que va-t-il se passer ? Si tu meurs et que je reste seul, je ne saurai pas quoi faire. Donne-moi donc un navire et des marchandises. Je partirai sur les mers pour devenir habile au commerce.

Son père lui ayant fourni un navire et des marchandises, il visita plusieurs pays, vendit ses marchandises, en acheta d’autres et réussit. Alors qu’il était en mer, il aperçut les arbres où habitait la princesse. L’équipage pensait que l’endroit était habité et voulut y accoster. En s’approchant, ils s’aperçurent qu’il ne s’agissait que d’arbres et voulurent faire demi-tour. Mais le fils du marchand

regarda dans la mer et vit un arbre au sommet duquel était assise une forme humaine. Il se dit qu’il se trompait peut-être et en parla à ses hommes. Ils regardèrent et virent aussi une forme humaine dans l’arbre. Ils décidèrent de s’approcher. Ils envoyèrent l’un d’entre eux dans une barque et gardèrent les yeux fixés sur l’eau afin que le messager puisse arriver jusqu’à l’arbre. Le messager arriva près de celui-ci et vit qu’un homme y habitait. Il en informa ses camarades. Le fils du marchand se rendit près de l’arbre et vit la princesse. Il lui dit de descendre. Elle lui répondit qu’elle ne viendrait pas à bord de son navire tant qu’il ne lui ferait pas la promesse de ne pas la toucher jusqu’à ce qu’il fût rentré chez lui et qu’ils fussent mariés. Il promit et la princesse monta à bord du navire. Le fils du marchand remarqua qu’elle était musicienne et qu’elle connaissait plusieurs langues. Il se réjouit beaucoup de l’avoir rencontrée.

Alors qu’ils approchaient de chez lui, elle lui indiqua la marche à suivre. Il devait rentrer chez lui, informer son père, sa famille et ses amis qu’une dame noble l’accompagnait, et leur dire de venir tous à sa rencontre. Alors, il saurait qui elle était. (Elle avait auparavant posé la condition suivante : il ne devait pas chercher à connaître son identité ; il la saurait après leur mariage). Il consentit à tout cela. Elle lui dit encore :
- Tu dois aussi donner à boire à tous les matelots du navire et leur faire savoir que leur patron se marie avec une grande dame.
Il lui obéit. Il prit du meilleur vin qu’il avait à bord et en donna aux matelots, qui s’enivrèrent.
Le fils du marchand rentra chez lui pour informer son père et ses amis. Les matelots, enivrés, descendirent à terre et s’écroulèrent d’ivresse.
Pendant ce temps, la famille du marchand s’apprêtait à venir accueillir la princesse. Mais celle-ci largua les amarres, déploya les voiles et partit à bord du navire. La famille se rendit à l’endroit où le navire devait être amarré, mais ne le trouva pas. Le marchand fut très en colère contre son fils. Ce dernier s’écria : ” Crois-moi, j’ai rapporté un navire et des marchandises ! ” Mais sa famille ne vit rien. Il dit : ” Demandez aux matelots ! ” Le père partit les interroger. Ils étaient couchés à terre, ivres. Finalement, ils se relevèrent et on les interrogea. Ils ne comprenaient pas ce qui se passait. Tout ce qu’ils savaient, c’était qu’on avait rapporté un navire plein de marchandises. Mais ils ignoraient où il était. Le marchand fut très en colère et chassa son fils de chez lui, le bannit de sa vue. Le fils partit et erra. Quant à la princesse, elle était partie en mer.

Il était une fois un roi qui s’était fait construire des palais sur la mer, car il aimait l’air marin. Des navires passaient au large de ses résidences. La princesse qui parcourait les mers passa près du palais royal. Le roi regarda et vit un navire voguant sans direction et sans personne à son bord. Il pensa qu’il se trompait. Il ordonna à ses gens de regarder et ils virent la même chose que lui.

La princesse, qui s’était approchée du palais, pensa : ” Qu’ai-je à faire d’un palais ? ” et man uvra pour repartir. Alors, le roi la vit et envoya ses gens pour la ramener chez lui. Puis il la fit entrer.
Le roi n’avait pas de femme car il n’arrivait pas à choisir. En effet, celle qu’il désirait ne voulait pas de lui, et inversement. Lorsque la princesse entra chez lui, elle lui demanda de jurer qu’il ne la toucherait pas avant qu’ils ne furent mariés selon la loi. Il jura. Puis elle lui dit qu’il ne devait ni ouvrir, ni toucher à son navire, lequel devait rester en mer jusqu’au mariage, afin que chacun sût qu’elle avait apporté des marchandises et ne dise pas que le roi avait pris une femme de la rue. Il le lui promit.

Le roi envoya des lettres d’invitation à son mariage dans tous les pays. Puis il fit construire des palais pour la princesse qui ordonna qu’on lui trouvât onze filles de princes en guise de suivantes. Le roi donna un ordre et on lui envoya onze filles de princes et ministres de haut rang. On leur fit bâtir onze palais privés ; la princesse avait aussi le sien. Les dames de compagnie rendaient visite à la princesse, faisaient de la musique et jouaient avec elle.

Un jour, elle leur dit qu’elle désirait partir en mer avec elles. Elle partirent sur le navire et jouèrent. La princesse ajouta qu’elle souhaitait leur offrir du vin qui se trouvait à bord et leur en donna. Elles s’enivrèrent, tombèrent et restèrent allongées. Alors, la princesse défit les amarres, déploya les voiles et le navire prit la mer.

Le roi et ses gens s’aperçurent que le navire de la princesse n’était plus là, et en furent très effrayés. (Le roi ne savait pas que la princesse s’était enfuie. Il la croyait dans son palais). Le roi dit à ses gens : ” Veillez à ne pas lui annoncer la nouvelle brutalement, car cela l’attristerait beaucoup “. Il craignait que la princesse pensât qu’il eût lui-même fait partir le navire. Il donna l’ordre d’envoyer une des dames de compagnie annoncer la nouvelle à la princesse avec tact. On se rendit dans l’une des chambres et on ne trouva personne. Il en fut de même dans la suivante : personne. On ne trouva âme qui vive dans les onze chambres. Le roi et ses gens décidèrent d’attendre la nuit et d’envoyer une vieille femme annoncer la nouvelle à la princesse. On se rendit dans sa chambre où on ne trouva personne non plus. Le roi et ses gens eurent très peur.

Entre-temps, les pères des dames de compagnie avaient remarqué qu’ils ne recevaient pas de

nouvelles de leurs filles. Ils envoyaient des lettres qui restaient sans réponses. Ils se rendirent chez leurs filles et ne trouvèrent aucune d’entre elles. Ils furent très en colère. Comme ils étaient ministres du royaume, ils voulurent bannir le roi. Mais ils se dirent : ” En quoi le roi est-il coupable et mérite-t-il une telle punition ? Il n’est pas vraiment fautif. ” On décida cependant de le faire abdiquer et de le chasser. Il fut renversé du trône et chassé. Le roi partit.

La princesse s’était donc enfuie sur son navire. Les dames de compagnie finirent par se réveiller et recommencèrent à jouer avec elle. Elles ignoraient que le navire était déjà loin de la côte. Elles dirent à la princesse : ” Rentrons à la maison ! ” Elle leur répondit : ” Restons ici encore un peu ! “
Puis un vent de tempête se leva. Elles répétèrent : ” Rentrons à la maison ! ” Elle leur avoua que le navire était déjà très loin de la côte. Elles lui demandèrent : ” Pourquoi as-tu fait cela ? ” Elle leur répondit qu’elle avait craint que le navire ne se brisât à cause de la tempête et qu’elle avait agi ainsi pour cette raison.
La princesse et ses dames de compagnie continuèrent donc leur voyage en mer tout en jouant de la musique. Elles passèrent au large d’un palais. Les dames de compagnie dirent à 1a princesse : ” Allons vers ce palais. ” Elle leur répondit qu’elle ne le voulait pas car elle regrettait déjà de s’être approchée de celui du roi.
Plus tard, elles aperçurent une chose qui ressemblait à une île. Elles s’y rendirent et rencontrèrent douze voleurs qui voulurent les tuer. La princesse leur demanda : ” Quel est le plus important d’entre vous ? ” Ils le lui indiquèrent. Elle dit au voleur : ” Que faites-vous ? ” Il lui répondit qu’ils étaient voleurs. Elle dit alors : ” Nous aussi nous sommes des voleurs, mais tandis que vous, vous volez grâce à votre force, nous, nous volons grâce à notre sagesse, car nous connaissons les langues et la musique. A quoi bon nous tuer ? Prenez-nous plutôt pour femmes et vous posséderez en plus de grandes richesses “. Et elle leur montra ce qu’elle avait à bord du navire lequel appartenait au fils du marchand qui possédait de nombreux biens. Les voleurs écoutèrent ses paroles. Ils lui montrèrent leurs richesses et firent visiter l’île à la princesse et à ses suivantes. Puis tous décidèrent d’un commun accord de ne pas s’épouser en même temps, mais l’un après l’autre. Chacun choisirait la dame qui lui convenait selon son rang.
La princesse leur dit qu’elle leur ferait l’honneur de leur donner du bon vin qu’elle avait à bord de son navire. Elle ajouta n’avoir jamais ouvert ce vin et qu’il était resté caché jusqu’à ce que Dieu lui envoie un compagnon selon son mérite.
Elle leur versa du vin dans douze gobelets et dit : ” Que chacun boive à la santé de tous ! ” Ils burent, s’enivrèrent et s’écroulèrent. Elle appela ses dames de compagnie et leur dit : ” A présent, que chacune aille tuer son homme ! ” Et elles les tuèrent tous.
Sur l’île, elles trouvèrent de grandes richesses telles qu’aucun roi n’en a jamais possédées. Elles décidèrent de ne prendre ni le cuivre, ni l’argent mais uniquement l’or et les pierres précieuses. Elles jetèrent par dessus bord tout ce qui n’avait pas grande valeur et chargèrent le navire d’objets rares, d’or et de pierres précieuses trouvés sur l’île. Elles décidèrent de ne plus porter de vêtements féminins, et se cousirent des habits d’homme selon la mode allemande. Puis, elles repartirent avec le navire.

Il était une fois un roi qui avait un fils unique. Il l’avait marié et lui avait donné son royaume. Un jour, le prince annonça à son père qu’il partait se promener en mer avec sa femme, car il souhaitait l’habituer à l’air marin au cas où il leur serait un jour nécessaire de s’enfuir par mer. Le prince monta à bord d’un navire avec sa femme et les grands du royaume, et ils partirent. Ils étaient joyeux et s’amusaient. Tous décidèrent d’enlever leurs vêtements si bien qu’il ne leur resta plus que leurs sous-vêtements. Puis ils essayèrent de voir qui serait capable de grimper jusqu’en haut du mât. Le prince aussi grimpa. Entre-temps, la princesse qui était à bord de son navire aperçût celui du prince. Elle eut d’abord peur de s’approcher. Elle s’en approcha quand même un peu, et voyant qu’on s’y amusait beaucoup, elle comprit que ce n’était pas un navire pirate. Elle fit approcher son navire un peu plus et dit à son entourage : ” Je suis capable de faire tomber ce chauve dans la mer ” (c’est-à-dire le prince qui avait grimpé en haut du mât et qui était chauve). Les dames de compagnie lui demandèrent : ” Comment est-ce possible ? Ils sont si loin de nous ! ” Elle leur dit alors qu’elle possédait une lentille capable de faire brûler et grâce à laquelle elle ferait tomber le prince dans la mer. Elle décida d’attendre que le prince eût atteint le haut du mât pour le faire tomber, car tant qu’il était à mi-chemin, s’il tombait, ce serait sur le pont ; mais s’il tombait depuis la pointe, ce serait dans la mer. Elle attendit donc qu’il fût arrivé en haut, saisit la lentille et la dirigea vers le cerveau du prince jusqu’à le brûler. Le prince tomba dans la mer. Alors la panique s’empara du navire. Personne ne savait quoi faire. Comment rentrer ? Le roi mourrait de chagrin. On décida d’aller à la rencontre du navire de la princesse que l’on apercevait. Il s’y trouverait peut-être un médecin susceptible de leur donner quelque conseil. Ils

s’approchèrent et dirent aux hommes présents sur le navire de la princesse de ne pas avoir peur, car ils ne leur feraient aucun mal. Ils leur demandèrent : ” Peut-être avez-vous à bord un médecin qui puisse nous conseiller ? ” Et ils racontèrent toute l’histoire, à savoir que le prince était tombé dans la mer. La princesse leur dit d’aller le repêcher. Ils partirent, retrouvèrent le prince et le sortirent de l’eau. La princesse prit le pouls du prince et déclara que le cerveau du prince avait été brûlé. On découpa son crâne et on constata qu’elle avait dit juste. Les gens du prince furent effrayés ; c’était en effet pour eux une grande merveille que le médecin (la princesse) eût deviné juste. Ils l’implorèrent de venir chez eux en leur compagnie. Elle serait le médecin du vieux roi qui la chérirait beaucoup. Elle refusa, disant qu’elle ne pratiquait pas la médecine, et qu’elle savait uniquement quelques petites choses. Mais les gens du prince ne voulaient pas retourner chez eux.

Les deux navires voguèrent de concert. Les grands du royaume auraient aimé que leur reine (la femme du prince) épousât le médecin car ils avaient compris que celui-ci était très savant (ils pensaient que la princesse était médecin à cause des vêtements masculins qu’elle portait). C’est pourquoi ils désiraient que la reine l’épousât et que ce dernier fût leur roi. Quant au vieux roi, le père du prince, ils le tueraient. Mais ils avaient honte de proposer à la reine d’épouser le médecin. La reine aussi souhaitait vivement l’épouser ; cependant elle craignait qu’on ne voulût pas de lui pour roi dans son pays.

On décida donc de donner un banquet, de telle sorte qu’après avoir bu, lorsque tous seraient très joyeux, on puisse en discuter. On organisa une fête pour tout le monde. Comme on donnait ce banquet en l’honneur du médecin (la princesse), il leur offrit de son vin et tous s’enivrèrent. Au beau milieu des réjouissances, les ministres du royaume s’écrièrent qu’il serait merveilleux que la reine épousât le médecin. Celui-ci s’écria aussi que ce serait en effet merveilleux, mais qu’il fallait en parler à jeun. La reine dit à son tour combien elle serait ravie de l’épouser, mais que le pays devait approuver ce projet. Le médecin répéta que ce serait fabuleux, à condition de ne pas en discuter tout en buvant. Puis, sortis de leur état d’ébriété, les ministres se souvinrent de leurs paroles et ils eurent honte d’avoir ainsi parlé devant la reine. La reine elle-même eut honte d’avoir parlé du projet devant les ministres. Mais elle se dit que eux aussi l’avaient évoqué. Alors, on se mit à discuter, puis on prit une décision. La reine se fiança au médecin (la princesse que l’on prenait pour tel) et ils rentrèrent dans leur pays.

Les habitants du pays furent très contents de les voir revenir car le prince était parti en mer depuis longtemps déjà et on ignorait où il était. Entre-temps, le vieux roi était mort. Lorsque le navire accosta, les habitants du pays virent que le prince, qui était leur roi, ne se trouvait pas à bord. Ils demandèrent : ” Où est notre roi ? ” Les autres leur racontèrent les faits : le prince était mort depuis longtemps et ils s’étaient choisi un nouveau monarque lequel les accompagnait. (il s’agissait du médecin, c’est-à-dire la princesse). Les habitants du pays se réjouirent beaucoup d’avoir un nouveau roi.
Celui-ci (la princesse) fit proclamer dans toutes les provinces du royaume que toute personne, étranger ou réfugié sans exception, assiste à son mariage où il recevrait de beaux cadeaux. En outre, le roi fit ériger des fontaines partout dans la ville, afin que quiconque ait soif, ne fût pas obligé d’aller ailleurs pour boire, mais trouvât une fontaine à proximité. Et le roi (la princesse) fit accrocher son portrait au-dessus de chacune d’elles et fit poster des gardiens pour les surveiller. Quiconque venait regarder attentivement son portrait et faisait la grimace, devait être arrêté et emprisonné. Les ordres du roi furent exécutés.
Ils arrivèrent tous les trois : le premier prince, époux légitime de la princesse ; le fils du marchand qui avait été exilé à cause de la princesse qui s’était échappée, et le roi, chassé à cause de la princesse qui s’était enfuie avec les onze dames de compagnie. Tous reconnurent son portrait ; ils le regardèrent attentivement, se souvinrent et devinrent très tristes. On les arrêta et les jeta en prison.

Le jour du mariage, le roi (la princesse) ordonna de faire comparaître les prisonniers devant lui. On les amena tous les trois et elle les reconnut, mais eux ne la reconnurent pas, car elle était habillée en homme. Elle prit la parole et dit : ” Toi, le roi, tu as été chassé à cause des onze suivantes disparues. Prends-les et retourne dans ton royaume. Et toi le marchand, ton père t’a renvoyé de chez lui à cause du navire et des marchandises disparues. Reprends ton navire et tes marchandises. Comme ton argent a été immobilisé longtemps, ton navire contient plus de richesses à présent car elles se sont multipliées (il avait en plus le butin des voleurs). Quant à toi, prince, viens et rentrons chez nous ! ”

Et ils rentrèrent chez eux. Amen et amen.

 

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